Mercredi dernier, le Gouvernement a dévoilé les grandes lignes du projet de réforme du prélèvement à la source qui devrait s’appliquer à compter du 1er janvier 2018.
Pourquoi instaurer un prélèvement à la source ?
Actuellement, un contribuable acquitte en 2016 l’impôt sur ses revenus de 2015 par le biais d’acomptes calculés sur le montant de ses revenus 2014. La régularisation du montant de l’impôt définitif dû sur les revenus perçus en 2015 intervenant en septembre 2016.
L’instauration d’un prélèvement à la source, dans le cadre duquel l’impôt se trouverait directement retenu sur les revenus, dès leur réalisation et en proportion de leur montant devrait mieux tenir compte des facultés contributives de chaque redevable au moment du paiement de l’impôt.
Qui sera concerné ?
Selon le gouvernement la majorité des revenus de plus de 98 % des foyers sera concernée par le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu.
S’il faudra attendre cet été et les débats autour du projet de loi de finances rectificative pour connaître avec précision les modalités pratiques, il a déjà été annoncé que le prélèvement à la source portera sur les revenus perçus par les salariés, les retraités, et sur les revenus de remplacement (allocations chômage, notamment), mais également sur les revenus des indépendants et les revenus fonciers. Les modalités de mise en œuvre du prélèvement sur ces deux dernières catégories posent toutefois un certain nombre de questions techniques et les solutions actuellement évoquées semblent finalement peu différer du mode actuel de détermination des acomptes.
Rappelons que la plupart des revenus de capitaux mobiliers (dividendes, intérêts), et les plus-values immobilières font déjà l’objet d’un prélèvement à la source.
Plus jamais de déclaration alors ?
Et non… il semblerait que la déclaration annuelle des revenus reste de règle.
En effet, du fait de la complexité du système fiscal français, le maintien d’une déclaration annuelle de l’ensemble des revenus perçus par le foyer fiscal semble nécessaire, afin de pouvoir permettre un calcul exact de l’impôt dû.
Sans modification majeure des règles de détermination de l’impôt, il semble en effet difficile d’instaurer un prélèvement à la source qui prenne parfaitement en compte l’ensemble des variables de l’équation : application du barème progressif, règles de quotient familial, droit à une de réduction ou à un crédit d’impôt (rachat de trimestres d’études, réalisation de dons, emploi d’un salarié à domicile…)
La déclaration annuelle devrait ainsi permettre la régularisation des excédents ou insuffisances de paiement. Celle-ci aurait lieu l’année suivant celle des prélèvements.
Ainsi, en 2019, au vu de la déclaration de leurs revenus de 2018 souscrite au printemps 2019, les contribuables pourront par exemple avoir droit à une restitution d’impôt si le montant total prélevé en 2018 par leur employeur au titre des revenus de 2018 excède l’impôt finalement dû.
Mon employeur va-t-il tout connaître de ma situation fiscale ?
Le gouvernement a souhaité rassurer en affirmant que l’employeur n’aurait connaissance que du taux de prélèvement à pratiquer, un même taux pouvant recouvrir des situations différentes. Il n’en reste pas moins un potentiel indicateur du niveau de revenus d’une personne ou d’un ménage.
Enfin, il a été affirmé que la confidentialité des informations personnelles des salariés (telles que leur situation familiale ou les revenus qu’ils perçoivent en sus de leur salaire) sera garantie, l’administration fiscale restant l’unique destinataire des informations fiscales et l’unique interlocuteur des contribuables.
Comment va se faire la transition ?
Année blanche ? Année double ? On pressent que les débats parlementaires seront animés…
Selon les premières annonces, l’impôt sera payé en 2017 sur les revenus de 2016 et en 2018 sur les revenus de 2018.
Il n’y aurait pas de double imposition en 2018 sur les revenus entrant dans le champ de la réforme et seuls les revenus exceptionnels ou les revenus exclus du champ de la réforme perçus en 2017 resteraient imposés en 2018.
Il faut toutefois s’attendre à ce que ce dispositif soit affiné dans le cadre de la loi de finances rectificative, et en particulier à ce que des mesures spécifiques soient mises en place pour éviter les optimisations.
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Ainsi, se dessine à ce stade un dispositif qui devrait permettre une certaine synchronisation entre la perception des revenus et l’imposition de ceux-ci, mais qui ne semble pas annonciateur d’une « grande réforme » fiscale, la logique de la détermination de l’impôt sur le revenu restant a priori inchangée.
La mise en œuvre du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu représente néanmoins un réel défi en pratique et Bercy est actuellement à la recherche d’entreprises pour tester le dispositif dès l’adoption définitive du texte, avant sa mise en place définitive prévue à compter du 1er janvier 2018.